Introduction à la Journée sur les 30 ans après la suppression du diplôme d'ISP
- Par serpsy1
- Le 26/03/2022 à 16:55
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Un mot de la présidente de S.E.R.PSY
Bonjour à tous,
Étant dans l’impossibilité de me joindre à vous pour cette journée du 21 Mars 2022, organisée par Serpsy et le théâtre de l’astronef autour de la
« SUPPRESSION DU DIPLÔME D’isp, TRENTE ANS APRÈS QUELLE TRANSMISSION ? »
dont le programme alléchant me fait d’autant plus regretter de ne pouvoir être présente j’avais envie de vous souhaiter une merveilleuse journée d’histoire, de récits, de rencontres, d’expérience et de partage. Puisqu’il est question de transmission, transmettons quelque chose, qui questionne, qui interpelle, qui dérange, mettons du désordre pour retrouver une curiosité, une motivation, un désir d’apprendre
Il ne s’agit pas de transmettre des connaissances, des techniques, mais plutôt des expériences de « petits riens ». Notre collègue Chantal Bernard dans son article : « Qui donc coupe les têtes ? » dit à propos des infirmières « On leur a bien accordé " un rôle propre " mais on ne leur a pas pour autant reconnu la faculté de penser. L'essentiel de leur travail, ce qu'elles font hors évaluation - le relationnel, les petits riens du quotidien - n'a pas d'existence ». Pourtant, chacun de ces petits riens indicibles est une pierre à la fondation du soin. Sans eux pas d'humanité, pas de soin. La spécificité relationnelle, l’écoute, l’importance du vécu de chacun, la nécessaire prise en compte de la dimension subjective dans la rencontre sont autant de « petits riens » mobilisés dans la relation soignant/soigné.
Je ne doute pas que vous aborderez l’importance de liens qui se tissent, d’engagements pris dans une culture du groupe avec des valeurs partagées où chacun se reconnaît comme faisant partie d’une maison commune.
C’est aussi à rendre visibles ces petits riens que la recherche de Jean-Paul Lanquetin : « L’impact de l’informel dans le travail infirmier en psychiatrie » s’est attachée. Il souligne d’ailleurs dans son article « Le tutorat d’intégration en psychiatrie » « Dans notre métier, la production de lien, social et thérapeutique, nécessite du temps passé avec le patient à expérimenter des modalités relationnelles, puisque cette construction porte en elle des possibilités même de compréhensions, de solutions ou d’accompagnements ».
Chaque table ronde « Avant-hier et Hier » qui vous fera sûrement voyager dans l’histoire de la psychiatrie et de ses fondateurs et précurseurs de Roumieux à Robert Clémente, la remémoration est un temps important dans le parcours de la transmission.
« Pour savoir où l’on va, il faut savoir d’où on vient » écrivait Anne-Marie Leyreloup (ancienne présidente et co-fondatrice de Serpsy) dans son article « Entre hier et aujourd’hui, le métier d’infirmier en psychiatrie » L’ISP a donc un devoir de mémoire car l’histoire de la psychiatrie, c’est aussi l’histoire du sujet. L’histoire nous fait « parcourir à rebours des chemins dont nous ne percevions pas la connaissance ; elle crée des potentiels inattendus ; elle dispose en découverte ce qui est notre héritage. » Hervé Bokobza (psychiatre et psychanalyste dans son article les enjeux de la transmission en psychiatrie) Pourtant il regrette qu’on tende « à transformer une discipline d’excellence, à savoir « extraordinaire », avec sa transmission nécessairement diversifiée et complexifiée, en une discipline ordinaire, comme les autres disciplines médicales, avec son redoutable corollaire, la transmission de savoirs jetables, c’est-à-dire la fabrication de soignants techniciens au service de l’idéologie ambiante »
Le psychiatre Georges Daumézon qui fit sa thèse en 1936 sur les infirmiers psychiatriques, écrit que « La genèse des pratiques de soins en santé mentale repose sur une antériorité des savoirs issus de l’activité de l’infirmier sur le savoir savant des aliénistes ».
Les tables rondes « Aujourd’hui et demain » en donnant la parole à des auteurs d’aujourd’hui (Dominique Friard, Madeleine Esther, Marie-France et Raymond Négrel en passant par Ahmed Benaïche, Virginie de Meulder et Christophe Malinowski vont donner la possibilité à ceux qui après avoir revisité le désaliénisme, la psychothérapie institutionnelle, la sectorisation auront à cœur de décoder ce qui se passe dans leur présent et d’ imaginer un nouveau demain de la psychiatrie, voire à construire les prémisses de l’an I de la psychiatrie comme l’a nommé Dominique FRIARD (un des autres co-fondateur et vice-président de Serpsy) dans la conclusion de cette journée
Si, « toutes les folies ne sont que des messages », (J.M.Jadin Psychiatre, Psychanalyste) , merci à tous les comédiens présents à cette journée d’être les porteurs de ces messages, les interprètes mais aussi les provocateurs, les empêcheurs de penser en rond , les fossoyeurs de la protocolisation abusive et de la réduction du soin psychique au symptôme et à la molécule. Merci d’être les conteurs des expériences collectives et des parcours singuliers
Merci d’avance à Frank qui nous permettra par ses images de témoigner et de nous souvenir...
Je conclurai par une autre citation de Bokozba : « La technique peut produire une culture de gratification immédiate, vecteur essentiel de l’apparition du DSM, voire du culte de la DMS (durée moyenne de séjour) où, hélas, bon nombre de psychiatres se sont engouffrés, aveuglés par l’idéologie ambiante : vite fait bien fait, plus c’est court mieux c’est, le temps est compté, nous sommes efficaces, performants, pragmatiques, transparents. Preuve que la folie continue à faire peur aux psychiatres… Renoncer à interroger la complexité du fonctionnement psychique et les limites mêmes de cette interrogation nous renvoie à devenir, à notre insu voire de notre plein gré, des courroies de transmission d’un système qui, par tous les moyens, concourt à promouvoir le système binaire comme référent unique du fonctionnement humain ; le slogan martelé du bon usage des soins a un unique soubassement : la maîtrise, qu’elle soit comptable, ou psychique. »
Jacqueline Fontaine, Mars 2022.
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