Analyse des points forts de la formation

Analyse des points forts de la formation

 

L’item dédié aux points forts de la formation est l’un des trois items les plus renseignés par les stagiaires : 98 % des feuilles de satisfaction en décrivent au moins un. A titre de comparaison, on ne trouve que 25 % de feuilles qui repèrent des points faibles ou suggèrent des points à améliorer.

Quels sont donc ces points forts ?

D’abord, l’ambiance au sein du groupe qui totalise 44 % de réponses à cet item. Le nombre est supérieur à 100 %, chaque stagiaire pouvant identifier plusieurs points forts. Même si elle est présente dès le premier groupe, la qualité de l’ambiance au sein des groupes devient un élément fort de la formation après le confinement et le déclenchement du plan blanc. Rappelons que cette formation est la seule à avoir été maintenue pendant cette période au sein de l’établissement. Tout se passe comme si ce temps de retrouvailles, d’élaboration en commun à un moment d’isolement au sein des unités de soin était plébiscité par les stagiaires. Les responsables de la direction de soin veillant à composer des groupes mixtes qui rassemblent des stagiaires venant d’unités différentes, représentant chaque pôle de l’hôpital, la formation, indépendamment de tout contenu pédagogique, permet aux soignants d’échanger sur leur vécu émotionnel de la période, lors des pauses ou des temps de repas. Ils ne sont pas seuls à vivre ce qu’ils  vivent. Un commun se dessine en ce temps de formation. D’une certaine façon, ça produit un effet de soulagement propice au réinvestissement du soin et notamment de l’entretien clinique : certains stagiaires le pointent d’ailleurs.

Chaque session débutant par un retour sur les tâches à accomplir lors des intersessions, les stagiaires font le constat que c’est difficile pour chacun et dans chaque unité. Ils ne sont pas les seuls à aller remplacer dans les unités dont les soignants sont impactés par la Covid. Ainsi donc la mixité des groupes qui mêlent des soignants de l’intra et de l’extra, qui travaillent en pédopsychiatrie ou en psychiatrie d’adultes, dans des unités d’accueil, de réinsertion ou de patients chroniques est un facteur extrêmement important dont les effets vont au-delà de la formation. Elle cimente le service de soins infirmiers. La qualité de l'ambiance est également relevée à l'issue des groupes XIII et XIV, beaucoup plus à distance du Covid. 

La qualité, la richesse des échanges est saluée par la plupart des stagiaires à un item ou à un autre. Il est permis de se demander si ce relatif plébiscite sur le groupe et sa vie affective ne relève pas d’une forme d’illusion groupale dans une formation qui s’est parfois déroulée sur plusieurs mois (Covid oblige). Les 5 stagiaires qui ont quitté leur groupe d’origine en raison du Covid et terminé la formation dans un autre groupe et même le stagiaire qui a connu trois groupes mettent également en avant la richesses des échanges au sein du  groupe. 

Bien sûr, le soin apporté à l’ambiance incombe au formateur et relève d’une méthode pédagogique qui se différencie du cours magistral. Pour que les stagiaires puissent échanger, il faut que le formateur se taise ou à tout le moins se mette en position d’écoute. Les petits groupes de 4 qui se retrouvent autour d’une séquence d’entretien à présenter au groupe et à analyser s’inscrivent bien dans cette démarche, tout comme le temps de préparation des jeux de rôle (pour les acteurs comme les observateurs).

Les Apports de connaissances théoriques constituent le deuxième point fort de la formation (41,50 % de réponses à cet item). Le formateur a, lui-même, été surpris de ce résultat. Il avait l’idée que les infirmiers étaient, en général, un peu réfractaires à la théorie. Il avait conçu le programme de formation avec cette pré-représentation en tête. Tous les groupes ne le mettent pas en avant. Le groupe 7 privilégie ainsi cette dimension de la formation, alors que le groupe 1 la met moins volontiers en exergue. La composition du groupe explique cet écart. Les jeunes infirmiers sont davantage avides de pratiques dépliées à la différence des infirmiers plus expérimentés qui peuvent grâce à l’apport théorique ranger leurs expériences, modifier leur regard sur les situations vécues et se projeter dans celles à venir. Les stagiaires des groupes 13 et 14 mettent en avant la  qualité de l'articulation entre théorie et pratique. Chaque notion théorique est immédiatement suivie d'une vignette clinique qui en propose une illustration.  

Ces apports théoriques sont peu décrits par les stagiaires. L’un mentionne l’alliance thérapeutique, le transfert et le contre-transfert, un autre évoque les symptômes et la psychopathologie, un autre encore un large balayage des  concepts ou la précision des notions. Ces connaissances théoriques, finalement peu décrites, contribuent globalement à (re)donner du sens à la pratique, à la réinvestir. La bibliographie, envoyée aux stagiaires par e-mail, les incite à se rendre au Centre de Documentation. Dans chaque groupe des ouvrages ont été empruntés et lus. Dans cette optique, le formateur a donné aux documentalistes de petits opuscules courts qui abordent différents outils théoriques et cliniques d’une manière très pédagogique. Photocopiés, ces opuscules, en général rédigés par le formateur, sont mis en avant par les documentalistes et disponibles pour les stagiaires.

Le questionnaire pré-post (questionnaire ouvert) proposé aux stagiaires depuis le groupe X montre qu’en effet les stagiaires investissent davantage les éléments théoriques et modifient leurs réponses en conséquence. « L’entretien informel n’est plus sans cadre, il admet un contexte, un lieu repéré, une durée, des objectifs, etc. Le mouvement et la progression du groupe sont nets. La formation a permis aux stagiaires de repérer ce qui fait cadre dans un entretien (formel ou informel), d’être en capacité d’en énoncer les éléments à chaque patient légèrement différents et de le construire. » Nous retrouvons la même évolution en ce qui concerne les effets thérapeutiques de l’entretien : « En prétest, quatre stagiaires ne peuvent citer aucun outil d’évaluation des effets thérapeutiques de l’entretien. Deux stagiaires se réfèrent aux objectifs préalables (VG, MF), deux à une validation collective (équipe), une à l’apaisement comportemental.

En posttest, tous les participants ont répondu à la question. Ils évaluent l’aspect thérapeutique à partir d’une grille de lecture (ou plutôt de relecture) de l’entretien (BS, JT –les transmissions ciblées sont une forme de grille de lecture-, IM, MF). Les réunions cliniques et l’analyse de pratique sont citées par d’autres collègues. Dans leurs réponses, l’entretien n’est plus simplement présenté comme une démarche préventive mais comme un temps fort que l’on trace sur le dossier, sur lequel on revient, qu’on analyse individuellement ou collectivement. »

Les méthodes pédagogiques constituent le 3ème point fort décrit par les stagiaires (40 % de réponses à cet item). Les méthodes pédagogiques sont inévitablement liées aux apports théoriques. Elles ont pour objectif de permettre aux stagiaires d’avoir accès à ce contenu théorique auquel ils n’ont pas pu avoir accès pendant leurs études en formation initiale. Ce constat est régulièrement fait lors de l’entrée en dynamique de formation qui débute chaque session. Il apparaît également dans les pré-tests remis au stagiaire à partir du groupe X. Les réponses obtenues en post-test (voir plus haut) permettent de mesurer le mouvement induit chez les stagiaires.

Quelles sont donc ces méthodes pédagogiques adoubées par les stagiaires ?

On trouve d’abord les mises en situation et les jeux de rôle. Ces méthodes controversées, y compris par les stagiaires qui les mettent en avant, favorisent une prise de rôle et permettent au stagiaire de se projeter dans la situation. Chaque jeu de rôle est construit par le groupe : le contexte, le patient, l’unité, les troubles, etc. Trois ou quatre soignants jouent la situation (si on y inclut un membre de la famille). Une fois le contexte de l’entretien déplié, les acteurs se retirent pour préparer leur scène. Le formateur travaille ensuite avec le groupe des observateurs qui devra définir ce qu’il est intéressant d’observer dans la situation (contenu du discours du patient, interactions entre les deux soignants, conclusion de l’entretien par les soignants, etc.). Chaque observateur a une tâche à accomplir et s’en fait le rapporteur pour le groupe au moment du débriefing. Le plus difficile pour les stagiaires est de jouer le rôle du soignant, de se mettre en situation de professionnel devant le groupe. C’est particulièrement difficile (en général) pour les infirmiers les plus jeunes professionnellement. Un jeu de rôle dure en moyenne vingt minutes. Le débriefing dure une heure en moyenne. Ces séquences sont particulièrement riches et permettent à chacun (acteur ou observateur) de se mettre en situation, d’analyser les différents temps de l’entretien. Elles permettent aux stagiaires (notamment les acteurs, patient ou professionnel) de conscientiser ce qu’ils font au cours d’un entretien. Un jeu de rôle, au moins, est proposé au cours de la formation.  

On trouve ensuite l’exposition de cas concrets ramenés du terrain par les stagiaires, expérimentés ou non pendant l’intersession. Différents types de méthodes ont été utilisées au fil des groupes. La première a été un questionnaire fabriqué par le formateur. Ce questionnaire interroge les patients sur leur perception de l’entretien infirmier. L’outil suppose la plupart du temps de mener un entretien avec le patient effectué à partir d’une grille à disposition du soignant. Cet outil a eu un extraordinaire succès avec les soignants des premiers groupes. Plus de 90  patients ont ainsi été interrogés. Le succès a été tel que les stagiaires des groupes suivants n’ont plus pu interroger  les  patients, la plupart de ceux qui pouvaient répondre au questionnaire ayant été mobilisés. Au début de chaque retour de formation, les stagiaires présentaient les questionnaires et décrivaient le contexte dans lequel chaque patient a été interrogé, ce que le questionnaire leur a appris sur l’entretien et comment la relation avec le patient en avait été  modifiée. La richesse des retours a été telle qu’une recherche sur la perception des patients a été entreprise par le formateur et S. Moriconi, l’infirmier spécialiste clinique et IPA qui organise la formation pour le CHS de Sevrey, a été entreprise et les premiers résultats présentés lors des 6ème Rencontres de la recherche en soins en psychiatrie à Lyon, en 2020. La Covid, les confinements, les déclenchements des plans blancs, les remplacements de collègues malades ont rendu les retours organisés du terrain plus complexes. Entre charge de travail accru, remplacements, maladies les soignants ont été progressivement moins disponibles pour ce travail, le formateur a donc demandé à chaque stagiaire de présenter la situation complexe d’un patient qu’il suit dans son unité. D’une façon brute, non préparée, à charge pour le collectif de construire le cas et d’examiner collectivement comment l’entretien infirmier pouvait répondre à cette complexité, quels objectifs de soin soignants et soignés pouvaient se poser. Cette modalité pédagogique qui pouvait, selon le nombre de stagiaires, mobiliser les 2/3 de la dernière journée de formation, a été beaucoup investie par les groupes où elle a été testée.  

Les stagiaires ont également mis en avant la durée de la formation, son découpage, les temps d’intersessions qui souvent décrits comme favorisants, ont été parfois perturbés par la Covid 19 et la disponibilité du formateur qui a dû effectuer un grand nombre de jours de formation dans un temps réduit (trois groupes en trois mois).  

Les exercices collectifs autour de la reformulation et son déploiement humoristique autour de « J’ai vu ma belle-mère hier » ont été également appréciés.

Les documents transmis (bibliographie, génosociogrammes, fleur du développement, notes, entretien mené par Rogers, etc.) sont prisés par les stagiaires comme la séquence vidéo inaugurée dans le groupe XI à partir du film d’Arnaud Desplechin : « Jimmy P., psychothérapie d’un indien des plaines ». Il s’agit ici de mettre en travail la question du transfert et du contre-transfert à partir de différentes grilles d’observation élaborées par le groupe (sur le mode des observateurs propre au jeu de rôle). Cette dernière innovation a été plébiscitée par le groupe qui y a vu l’occasion de nouer un autre rapport au cinéma et à l’image en général. En dehors de la rigueur du travail de Georges Devereux et de la qualité des images de Desplechin, le film montre que le soignant peut ne pas être infaillible. Au moment où la psychothérapie débute Devereux est malade, fiévreux, présente des symptômes qui peuvent évoquer la Covid, et Jimmy s’en inquiète. Il prend soin de celui qui n’est pas encore tout à fait son thérapeute. Les stagiaires y retrouvent quelque chose de tout à fait contemporain. Les stagiaires des groupes 13 et 14 ont particulièrement apprécié le film et la reprise organisée. 

La variété  des méthodes pédagogiques est pointée par de nombreux stagiaires.

Le formateur constitue un quatrième point fort de la formation qui est cité dans 39 % des réponses à l’item. La qualité de l’ambiance, la pertinence des points théoriques, les méthodes pédagogiques utilisées sont de la responsabilité du formateur, fallait-il distinguer une catégorie particulière pour le repérer comme un point fort de la formation ? Les réponses des stagiaires nous y ont contraints. S’y exprime quelque chose sinon du transfert sur le formateur, à tout le moins quelques éléments identificatoires qui jouent un rôle sur l’efficacité de la formation. Les stagiaires du groupe XIV ont particulièrement insisté sur ce point. 

Quels sont-ils ?

Le formateur apparaît d’abord comme un pair, un professionnel infirmier, certes de secteur psychiatrique, mais qui part d’un commun. « M. Friard », comme l’écrit un des stagiaires, présente des cas véridiques, de vrais patients. Il sait de quoi il parle pour l’avoir vécu. Et ce qu’il a vécu, nous pouvons aussi le vivre.  Il partage ses expériences avec nous. L’identification joue à plein.

Les stagiaires mettent ensuite en avant ses connaissances, sa connaissance du sujet (« sa maîtrise » écrivent deux stagiaires), une connaissance non pas seulement livresque ou théorique (« un puits de science » écrit un stagiaire) mais basée sur des expériences professionnelles variées qu’il partage avec le groupe.

Les stagiaires décrivent un formateur pédagogue, à l’écoute, bienveillant, dans le partage.

Les connaissances pratiques constituent 27,50 % des réponses à l’item. Elles permettent de revenir au cœur du métier qui est la relation avec le patient, écrit un stagiaire. Elles éclairent la pratique quotidienne. L’entretien d’accueil, les différents outils présentés, sont non seulement aidant pour la pratique quotidienne (expression qui revient souvent) mais permettent de se remettre en question. Elles s’appuient sur les cas concrets présentés à différents moments de la formation.

En résumé, une formation dont les points forts sont l’ambiance au sein du groupe, les apports théoriques, la méthodologie, le formateur infirmier et à un degré moindre les connaissances pratiques apportées par la formation. Aucun de ces points ne se détache véritablement, il s’agit d’un bloc fait des quatre points principaux identifiés par les stagiaires. Si l’ambiance au sein du groupe est citée par 54 stagiaires, le formateur est mis en avant par 48 d’entre eux. Les écarts sont très faibles. 

Date de dernière mise à jour : 18/09/2024

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